Comprendre les marchés grâce aux lois de la physique
Introduction : Pourquoi les marchés suivent-ils les lois de la nature ?
Depuis des milliards d’années, l’univers suit une règle fondamentale : l’énergie se dissipe et l’entropie augmente (c’est-à-dire que le désordre croît). Cette loi s’applique aussi bien aux étoiles, aux océans et aux écosystèmes qu’aux marchés financiers.
Les marchés absorbent de l’énergie (des capitaux, des informations) et diffusent des résultats (profits ou pertes). Mais comme tout système complexe, ils atteignent un point critique : une situation instable où un simple choc peut provoquer un effondrement brutal, un krach.
L’objectif ici n’est pas de prédire le moment exact d’un krach (impossible), mais d’apprendre à identifier les signes avant-coureurs pour protéger ses investissements.
La loi de puissance et les avalanches : Le comportement naturel des marchés
Imaginez un tas de sable. Vous ajoutez des grains un par un :
• Au début, le sable s’accumule calmement.
• Mais au bout d’un moment, la pente devient critique. Une perturbation (un grain de sable supplémentaire) peut déclencher une avalanche.
La caractéristique de cette avalanche est fascinante :
• Elle suit une loi de puissance (appelée aussi ratio 1/F).
• Cela signifie que :
• Les petites avalanches sont fréquentes.
• Les grandes avalanches sont rares, mais elles existent.
• Leur amplitude est inversement proportionnelle à leur fréquence.
Exemple concret :
• Une petite correction de -1% des marchés peut arriver chaque semaine.
• Une chute de -10% survient une fois par an.
• Un krach de -50% est exceptionnel, mais statistiquement inévitable sur le long terme.
Les marchés financiers se comportent exactement comme ce tas de sable :
• Ils accumulent des déséquilibres (surendettement, valorisations excessives).
• Lorsqu’ils atteignent une pente critique, une petite perturbation peut déclencher un effondrement massif.
Les signes d’un marché en pente critique
Les krachs surviennent lorsque les déséquilibres atteignent un point de non-retour. Voici les indicateurs clés à surveiller pour anticiper un krach.
La dette excessive est souvent le carburant des crises financières. Plus elle est élevée, plus le système devient vulnérable. Aujourd’hui, la dette mondiale atteint 315 000 milliards de dollars, soit 330% du PIB mondial. Les pays comme les États-Unis, l’Italie ou le Japon dépassent 120% du PIB. Une dette élevée signifie qu’une simple hausse des taux d’intérêt peut déclencher des défauts en cascade. C’est exactement ce qui s’est produit en 2008 avec l’explosion de la bulle immobilière aux États-Unis, provoquant une chute mondiale de 50% sur les marchés.
Les valorisations excessives sont un autre signal. Lorsque les prix des actifs s’écartent trop de la réalité économique, le marché devient instable. L’indicateur Shiller P/E (PER ajusté sur 10 ans) est un excellent outil pour mesurer ces déséquilibres. Sa moyenne historique est de 16, mais aujourd’hui il atteint 30, un niveau similaire à ceux observés avant la crise de 1929 et de la bulle internet en 2000. Un Shiller P/E supérieur à 25 est un seuil critique qui rend les marchés vulnérables au moindre choc extérieur.
La stagflation est le signal ultime que le marché atteint une pente critique. La stagflation est une combinaison de faible croissance économique et de forte inflation. Elle est particulièrement dangereuse car les entreprises subissent des coûts élevés alors que leurs revenus stagnent. Dans les années 1970, l’inflation mondiale avait atteint 13% tandis que la croissance était inférieure à 2%, entraînant un effondrement des marchés mondiaux. En 2022, des signes similaires sont apparus avec une inflation mondiale à 8,8% et une croissance ralentissant à 3,2%.
Gérer le risque : Comment éviter l’avalanche
La stratégie pour anticiper un krach n’est pas de prédire quand il aura lieu (impossible), mais de surveiller les signes de déséquilibres et de réagir intelligemment.
Surveiller les indicateurs critiques est essentiel :
• Des niveaux d’endettement publics supérieurs à 120% du PIB indiquent une fragilité économique.
• Un Shiller P/E supérieur à 25 révèle un marché surévalué, prêt à corriger.
• Une inflation supérieure à 5% couplée à une croissance inférieure à 2% est le signe d’une stagflation dangereuse.
Une fois ces signes repérés, il est temps d’adapter sa stratégie d’investissement. Réduire l’exposition aux actions surévaluées permet de protéger son capital. Sortir des secteurs spéculatifs (comme la technologie en bulle ou les cryptomonnaies) limite les pertes potentielles. Se tourner vers des valeurs refuges comme l’or, les métaux précieux ou des obligations d’État solides est une démarche prudente. Diversifier ses investissements vers des actifs plus tangibles (comme l’immobilier ou les matières premières) permet également de réduire les risques. Enfin, augmenter sa trésorerie offre l’opportunité de réinvestir après la crise, lorsque les actifs seront revenus à des niveaux raisonnables.
Conclusion : Les marchés obéissent aux lois de la nature
Les marchés financiers, comme les systèmes naturels, suivent les lois de la thermodynamique et de la loi de puissance. Ils se stabilisent temporairement par de petites corrections fréquentes, mais ces corrections masquent un danger sous-jacent : un effondrement massif est inévitable lorsque les déséquilibres deviennent trop importants.
Les signes sont clairs :
• Une dette excessive (>120% du PIB),
• Des valorisations déconnectées des fondamentaux,
• Une stagflation persistante.
Lorsque ces facteurs se combinent, le marché atteint sa pente critique. La chute est alors une certitude statistique, bien que son timing reste imprévisible.
Observer les déséquilibres, réduire les risques et éviter d’être présent lorsque l’avalanche commence : c’est la seule manière intelligente de naviguer dans un marché thermodynamiquement instable.
« La stabilité est toujours temporaire : il faut savoir quitter la montagne avant que la neige ne s’écroule. »
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